Testimonials / Témoignages

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Nous avons des expériences un peu différentes dans notre acquisition du français qui, pour nous deux, est notre deuxième langue. Une d’entre nous a commencé à apprendre le français dans une école d'immersion quand elle était en maternelle. L’autre avait dix ans quand elle a débarqué dans le programme de français de base à son école. Nous avons trouvé que nos écoles visent l’apprentissage du français écrit et la grammaire. Nous n’avons pas eu beaucoup d’occasions de pratiquer notre français oral. Le manque de pratique à l’oral était un défi quand nous nous sommes rendus à l’université et on a dû faire des présentations orales et communiquer nos idées en cours.

Même si nous avons acquis cette deuxième langue depuis plusieurs années et que nous suivons des cours en français à l’université, nous avons encore des anxiétés face à la langue française. Une d’entre nous travaille dans une école francophone et elle est gênée parfois quand elle parle avec des francophones. Elle pense que les autres professeurs qui parlent le français comme langue maternelle la jugent. L’autre a des angoisses avec le français parce qu’elle n’était pas en immersion avant d’aller à l’université. Elle a l’impression que ses compétences à l’oral et à l’écrit sont inférieures par rapport aux autres étudiants qui ont suivi l’immersion.

Selon nous, la traduction rend l’apprentissage des langues moins angoissant parce que l’acte de traduire nous donne plus de confiance avec nos compétences linguistiques. Si nous pouvons comprendre un texte en ayant les connaissances nécessaires pour jouer avec la langue française pour créer une bonne traduction, ça nous montre que nous avons une certaine maîtrise du français et de l’anglais. Nous nous amusons beaucoup avec la traduction, bien que nous ayons des angoisses avec la langue française. Les activités de la traduction nous permettent d'être créatives et en pratiquant la traduction, nous commençons à nous sentir plus à l'aise avec nos compétences linguistiques. Nous sommes fiers d’être bilingues malgré le fait que notre deuxième langue peut être source d’anxiété.

 

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La première langue à laquelle j'ai été exposée était le Twi, le dialecte courant du peuple Ashanti du Ghana. Le twi est une langue incroyablement belle, riche en histoire et en nuances. Sa tonalité et son oralité la rendent difficile à apprendre pour les locuteurs non natifs. Contrairement à de nombreuses autres langues, le twi n'a été écrit que des siècles après sa création et, malheureusement, en raison de la colonisation et de la nature impérialiste de la langue anglaise, l'anglais est également l'une des langues nationales du Ghana. Par conséquent, les locuteurs du twi incluent souvent des mots anglais dans leurs phrases, car ces mots n'existent pas dans leur langue maternelle. Ayant immigré au Canada à un très jeune âge, la pression de l'assimilation m'a poussé à abandonner ma langue maternelle en faveur de l'anglais, car je pensais qu'une bonne maîtrise de l'anglais augmenterait mes perspectives d'emploi et me permettrait de mieux m'intégrer dans mon nouvel environnement.

En mûrissant, je me suis engagée à redécouvrir qui je suis et d'où je viens. Cela implique également de réapprendre la langue que j'ai ignorée pendant tant d'années. Je n'avais pas du tout honte de ma langue, mais je ne la considérais pas comme utile. Aujourd'hui, dans mon effort de réapprentissage, je m'immerge dans la culture et les gens, mais je me sens souvent gêné parce que lorsque j'essaie, les gens me disent que je devrais déjà connaître la langue et qu'il est triste que je n'aie pas valorisé la langue comme je l'aurais dû. Ils ont raison, mais ces sentiments me laissent un sentiment de découragement et je ressens un sentiment d'anxiété et de pression parce que je ne suis pas là où je devrais être. C'est parfois triste et blessant, mais il est très important pour moi de renouer avec mes origines.

En outre, je ressens la même pression lorsqu'il s'agit de parler français avec des francophones de naissance. Souvent, je choisis de parler anglais par peur de l'embarras. Le fait que je sois d'un tempérament très calme et timide ne m'aide pas non plus, et dans les situations où je dois utiliser mes compétences en français à l'oral, je deviens extrêmement nerveux. Il y a tellement de régions du monde qui parlent français, et chaque région a ses propres accents et familiarités, donc s'adapter à ceux-ci tout en essayant de ne pas m'embarrasser est difficile. Je pense que mes points forts résident dans mon travail écrit, donc je me suis appuyée sur cela pour réussir, tout en négligeant ma pratique orale.

 

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Il y a beaucoup d’anxiétés associées à l’apprentissage d’une deuxième ou troisième langue, que ce soit à l’orale ou à l’écrit. Pour nous, les plus grandes anxiétés portent sur notre incapacité de nous exprimer et les jugements que portent les autres personnes envers nos compétences linguistiques.

Quelques peurs et anxiétés que nous avons qui sont associées à l'apprentissage des langues sont basées sur le fait qu'on a appris ces langues en même temps. Ces peurs et anxiétés ont été entièrement créées parce qu'on a moitié appris deux langues dans les programmes d'immersion. Lorsque nous étions dans ces situations sociales, il était difficile d'expliquer à des personnes monolingues qui ne comprenaient pas notre situation pourquoi c'était une situation difficile pour nous. Apprendre deux langues à des rythmes différents à l'école est devenu la source d'une grande partie de cette anxiété. C'est la nature humaine d'être social et de s'exprimer, mais cela peut être difficile dans une deuxième langue, surtout lorsqu’on est entouré de locuteurs natifs. Un autre obstacle était la difficulté à comprendre le niveau de vocabulaire dans différentes situations. Il était difficile de connaître la différence entre le vocabulaire professionnel et personnel.

Une autre chose qui nous donne de l'anxiété sont les jugements des autres personnes. Quand on parle, on a souvent l’impression qu’il faut s’exprimer parfaitement, sans erreurs grammaticales. Quand on ne réussit pas, les gens passent souvent à l'anglais et refusent de nous permettre de corriger nos erreurs. Il y a aussi des jugements sur nos accents. Dans l'apprentissage des langues, il y a une hiérarchie quant à l'accent que les gens devraient utiliser, qui est liée au racisme et à la discrimination. Cette hiérarchie est renforcée par les écoles qui préfèrent un accent parisien à l'accent québécois et ontarien. Si vous ne parlez pas avec l'accent standard d'une langue, les gens supposent que vous êtes moins intelligent et incapable de comprendre la langue. Dans l'ensemble, cette peur du jugement pousse les gens à changer d'accent.

 Ceci dit, même si on a plus d'anxiété en parlant une deuxième langue face à notre langue maternelle, on aime quand même parler nos deuxièmes langues. Pour nous, la traduction nous aide à comprendre la structure des langues et nous aide à nous exprimer mieux.

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